Entreprendre dans le secteur des nouvelles technologies et du numérique n’est pas réservé aux hommes. Et pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2019, les femmes dirigeantes de startups représentaient moins de 10% de l’ensemble des dirigeant.es d’entreprise. À EuraTechnologies, elles ont osé sauter le pas et ont découvert que le secteur de la tech est accessible, mais qu’il y demeure des carences en modèles féminins auxquels s’identifier. Témoignages recueillis.
Le rapport « Women in tech 2021 » de l’entreprise de cybersécurité Kaspersky vient de paraître et mentionne que 27,6 % des femmes de 18 à 24 ans travaillant dans la tech ont choisi leur profession grâce à l’inspiration d’un rôle modèle. Cette tranche d’âge, si elle est cruciale à convaincre pour l’amorce de carrières futures dans l’entrepreneuriat, n’est pas la seule concernée, les femmes représentant la moitié de la population française. Dès lors que l’on s’interroge sur la légitimité et la place des femmes dans un corps de métier, dans un statut social ou à des postes clés, il est nécessaire de prendre du recul sur nos sociétés occidentales. L’histoire de l’émancipation féminine a moins d’un siècle, si l’on comptabilise le droit de vote (1944), le droit de travailler sans l’accord du mari (1965) et la fin de la soumission pour les femmes à l’autorité du père et du mari (1970). Le modèle de la femme entrepreneure n’est ainsi pas ancré dans l’Histoire comme un « standard » mais plutôt comme une exception et les modèles de femmes puissantes constituaient jusqu’à il y a peu des modèles marginaux.
Le syndrome de l’imposteur, frein à l’entrepreneuriat au féminin
La sphère entrepreneuriale compte désormais des femmes leaders à travers le monde, mais il est plus aisé de citer, lorsque l’on parle par exemple des Gafam (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), des noms tels que Bill Gates, Jeff Bezos (ex-pdg), Mark Zuckerberg, Sundar Pichai, Tim Cook… En France, à ce jour, aucune femme ne siège à la tête d’une entreprise du Cac 40 et elles ne sont qu’une dizaine à la tête du SBF 120, les 120 entreprises françaises cotées en Bourse.
De nombreuses initiatives existent pour soutenir les femmes dans une carrière de dirigeante d’entreprise (fonds d’investissement, bourses de soutien, séminaires et événements dédiés) mais le changement a opérer est plus profond et plus sociétal. D’autres solutions consistent à travailler le sujet à la racine en incitant les jeunes femmes à s’intéresser aux perspectives de carrière dans l’IT, l’entrepreneuriat, les parcours d’ingénieur, le développement informatique, etc, dès le cycle collège-lycée pour accompagner un changement de mentalité global. L’impact est important au niveau économique, les femmes représentant 50% de la population et donc un fort potentiel en développement de carrières pour l’économie du territoire. Le souci n’étant pas un souci de compétences mais un souci de capacités à se projeter et à s’identifier dans des métiers qui ont depuis toujours été occupés par des hommes.
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C’est en substance ce même syndrome qu’à ressenti Laurence Joly, co-fondatrice de Diag’n’Grow malgré une carrière précédente bien établie : « Dans ma carrière professionnelle (15 ans à l’INPI), j’étais la seule femme pour des raisons de cheminement de compétences. Ça arrive. Mais dans l’entrepreneuriat, j’ai ressenti qu’on était peu de femmes à oser se lancer. Comme nous sommes peu, on se repère facilement et on est aussi plus facilement sollicitées.
Les femmes peuvent paraître moins ambitieuses, leurs critères de réussite ne vont pas être les mêmes que ceux des hommes. On se survend moins et on ne se pose peut-être pas les mêmes questions que les hommes quant à la prise de risque. Mais nos entreprises si l’on regarde les chiffres*, sont plus pérennes et rentables. »
*D’après la dernière étude de la société d’investissement Women Equity Partners portant sur plus de 40 000 entreprises de taille moyenne, les entreprises avec des dirigeantes à leur tête seraient plus rentables de l’ordre de 32 %.
Pour puiser de la force au quotidien, Estelle Réau écoute des dizaines de podcasts qui mettent en avant des femmes inspirantes. Elle admire notamment les profils des cheffes Hélène Darroze, Anne-Sophie Pic… Mais aussi la COO de Facebook, Sheryl Sandberg.
Estelle Réau décrit la force de l’écosystème, du réseau et de l’entraide qui existe à EuraTechnologies entre tous les entrepreneurs, hommes ou femmes et le petit plus relationnel qu’apporte la proximité entre femmes entrepreneures : « Agathe m’a prêté une tenue pour un shooting photo, Sophie de la startup Houbline était partenaire et a fourni des contreparties sur ma campagne de crowdfunding et j’ai également eu un coup de main de la part de Selmine Hirti, CEO de Primp. »
Une jeune génération confiante et audacieuse
Pour surmonter le « trac » induit par ces sorties de sa zone de confort, Mathilde Garin admet laisser sa personnalité de côté pour être le plus factuelle possible : « Je rentre dans le moule, alors que ce n’est pas mon style, je suis d’ordinaire assez détendue. Là, j’oublie mon sourire, les vannes et je reste sur une présentation pure et dure. » Elle différencie alors les retours qu’elle obtient sur son entreprise selon s’ils ont été obtenus en contexte tendu ou non : « A EuraTechnologies, quand les retours sont bons, je me dis qu’on est à la fois content de ce que j’ai donné de moi ET de la façon dont j’ai mené ma boîte. À l’extérieur, si j’ai dû faire ce type de présentation en contexte tendu, je me dis que c’est l’idée seule qui est perçue comme viable. »
« J’ai de grosses ambitions pour mon projet. Le métier de mes rêves n’existe pas, je veux le créer. Et je me vois bien développer Koltrain toute ma carrière » se projette t-elle.